Chapitre 4

Architecture et représentation des documents dans Madeus

[Table des matières]

1 Introduction

Ce chapitre présente le système d'édition et de présentation Madeus qui met en oeuvre, dans un environnement interactif, un modèle temporel de documents multimédia fondé sur les contraintes.

La démarche adoptée consiste à mettre en correspondance d'une part le processus d'édition avec la phase de formulation et d'analyse d'un problème de type CSP temporels (insertion d'intervalles, de relations temporelles et vérification de la cohérence), et d'autre part le processus de présentation avec la phase de résolution de ce problème (la synthèse). La Fig 0 illustre cette démarche.

Image CSP_Madeus.gif
Fig 0. Système d'édition multimédia et CSP temporels

La validation de cette approche s'appuie, en grande partie, sur la réalisation d'un environnement opérationnel complet dont nous décrivons les objectifs et les principales caractéristiques dans la première section de ce chapitre.

La deuxième partie est consacrée à la description du format de document utilisé. Cette description, illustrée à travers un document exemple, couvre les organisations logique, temporelle et hypermédia des documents. L'interface graphique d'édition et l'organisation spatiale ne sont pas présentées de façon détaillée dans la mesure où, n'étant pas au coeur de cette thèse, la solution actuelle n'est pas figée [CAR 97]. Cependant, un des choix de réalisation de Madeus est la construction d'une application ouverte et extensible pour permettre, dans une perspective à plus long terme, un travail plus complet sur la dimension spatiale [LAY 95].

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2 Le système Madeus

Après une discussion des principes qui ont présidé la conception de Madeus, nous présentons son architecture générale ainsi que la méthode de construction des documents que nous avons définie. Ensuite, une présentation générale de l'éditeur lui-même est effectuée, de façon à identifier les fonctions de manipulation de la structure temporelle de celles du système de présentation des documents. Ces deux tâches fondamentales du système Madeus font respectivement l'objet des chapitres V et VI.

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2.1 Principes de conception

L'approche adoptée dans cette thèse tente d'allier édition interactive et présentation multimédia avec un domaine de l'intelligence artificielle qui traite du problème des contraintes.

Du côté de l'édition, ce qui nous paraît intéressant dans une approche interactive similaire au Wysiwyg, c'est la possibilité de voir et de modifier le document sans changer d'environnement : le passage du mode d'édition au mode de présentation, et vice-versa, doit être aussi fluide que possible. L'intérêt d'une telle approche réside dans l'interactivité, qui rend plus facile l'accès au système et permet à l'utilisateur de vérifier en permanence ce qu'il fait. Ce principe, largement adopté pour les documents statiques, est cependant plus complexe à mettre en oeuvre pour les documents multimédia. Cela est du à la nature temporelle très diverse des éléments multimédia et des dimensions multiples du document.

D'un autre côté, les systèmes de contraintes permettent à l'auteur d'exprimer, par l'insertion (potentiellement interactive) de relations, ce qu'il souhaite obtenir, sans se soucier de la complexité du scénario qu'il construit. Les systèmes de contraintes permettent ainsi, par des méthodes plus systématiques d'analyse et de synthèse, de vérifier la cohérence d'un scénario temporel et de rechercher une solution, même pour des situations complexes. De plus, l'approche déclarative, inhérente aux systèmes de contraintes, ouvre des perspectives plus larges au traitement électronique du document multimédia. En effet, à partir de la description des relations entre les différents éléments d'un document, cette approche permet de construire des structures de données (graphe de contraintes) qui se prêtent mieux aux traitements adaptatifs, voire génériques, contrairement aux descriptions impératives qui produisent des programmes moins adaptables. Des exemples typiques de ces traitements sont l'adaptation du contenu d'un document en fonction de la langue du lecteur ou encore en fonction des ressources disponibles dans son environnement (taille d'écran, possibilités graphiques ou sonores). Du point de vue des contraintes, ces adaptations peuvent se ramener à une modification et une ré-évaluation du graphe de contraintes. Par exemple, le changement de la langue peut être ramené au changement de la durée des éléments audio dans le graphe de contraintes.

En partant de ces deux constats, le système Madeus tente de tirer profit des avantages des systèmes de contraintes pour l'édition multimédia en offrant à l'utilisateur, à travers la même interface graphique, des fonctions d'édition et de présentation. Du point de vue théorique, il s'agit aussi de compléter les systèmes de contraintes pour prendre en compte l'incrémentalité, l'indéterminisme et la causalité inhérents à l'édition et aux présentations multimédia.

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2.2 Architecture générale de l'application Madeus

Nous présentons dans cette section l'architecture générale de l'application Madeus. Cette architecture est organisée sous forme de quatre parties qui interagissent tout au long d'une session d'édition (voir Fig 1 ) :
Image MadeusArch.gif
Fig 1. Architecture générale de l'éditeur Madeus

Lors du chargement, le document est pris en charge par le système d'édition qui en produit une forme interne. Cette représentation, appelée arbre abstrait, rend compte de l'organisation logique du document en termes d'éléments composites et d'éléments de base (cf. Chapitre II). Chaque noeud composite de cet arbre est décoré par la liste des relations temporelles ou spatiales définies entre ses fils. Le gestionnaire temporel intervient à chaque opération qui modifie la structure temporelle du document. Il maintient une représentation du document sous forme de graphes de contraintes (un graphe de contraintes est associé à chaque élément composite) exploitables dans leur forme finale par le système de présentation. Le système de présentation assure la fonction d'exécution du document sur une structure interne appelée graphe d'exécution, dérivée des graphes de contraintes.

L'interface utilisateur et le système d'édition sont brièvement décrits dans les deux sections suivantes, à travers la suite des opérations effectuées par l'auteur pour composer un document. La syntaxe utilisée et la structure de l'arbre abstrait qui en découle sont données dans la section 3, principalement à l'aide d'un exemple complet développé. Le gestionnaire temporel fait l'objet du Chapitre V tandis que le système de présentation est décrit dans le Chapitre VI.

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2.3 Vue d'ensemble du processus d'édition dans Madeus

L'utilisateur d'un système de production de documents multimédia peut s'intéresser à différents aspects d'un document : en tant qu'auteur il va s'intéresser au contenu et à l'organisation en composants du document, alors qu'en tant que graphiste son intérêt sera axé sur la mise en page et la disposition graphique. En tant que compositeur de scénario, son attention se portera sur l'enchaînement des éléments dans le temps.

À partir des facettes multiples d'un document introduites dans le chapitre II, nous pouvons considérer que le processus d'édition d'un document est une combinaison des quatre fonctions suivantes

:

L'ordre d'accès à ces fonctions est totalement libre pour l'auteur, hormis la nécessité d'effectuer l'opération de création d'éléments avant de les composer avec d'autres. La construction progressive d'un document multimédia est facilitée grâce à deux aspects fondamentaux de Madeus : Les différentes fonctions d'édition et de présentation sont rendues accessibles à travers l'interface utilisateur décrite ci-dessous.

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2.4 Interface utilisateur de Madeus

L'interface d'édition et de présentation de Madeus (voir Fig 2 ) est construite au-dessus de la boîte à outils graphique de OSF/Motif [MOT 92]. Elle est composée d'une fenêtre principale organisée sous forme d'un ensemble de widgets permettant à l'utilisateur de réaliser les fonctions citées dans la section précédente. À travers cette interface, l'utilisateur peut charger un document, le modifier, interagir avec ses éléments ou contrôler sa progression temporelle. Il peut aussi agir sur les paramètres de sortie du document comme la taille de la fenêtre, sa partie visible (à travers les barres de défilement) ou encore contrôler le volume audio global de la présentation.
Image Madeus_Interface.gif
Fig 2. Interface utilisateur de l'éditeur Madeus

Un document Madeus peut être visualisé selon deux formats dans deux fenêtres différentes : le document composé (ou en cours de composition) est affiché et exécuté dans la fenêtre « principale » tandis que sa forme pivot (textuelle) est affichée dans la fenêtre « source ». À la fenêtre principale sont associées deux palettes d'édition : la palette d'opérateurs temporels et la palette d'opérateurs spatiaux.

La fenêtre principale est composée de six parties (numérotées sur la Fig 2 ) qui offrent des fonctions d'édition et de présentation :

  1. Une cascade de menus permettant de définir les attributs des éléments du document, par exemple leur durée ou la fonte des caractères (cf. 3.5).
  2. Une barre de boutons permettant de charger un document, de lancer sa présentation ou sa sauvegarde, ainsi que d'insérer de nouveaux éléments.
  3. Une zone de saisie du nom ou de l'adresse d'un document permettant son chargement à partir d'un fichier local ou d'un serveur distant (HTTP). La syntaxe des noms de fichiers utilisée est identique à celle employée dans le web : les URL (Uniform Resource Locator) [BER 92].
  4. Une surface d'édition/présentation et d'interaction qui est la zone principale de restitution graphique du document.
  5. Un panneau de contrôle de la progression temporelle de la présentation d'un document. Ce panneau contient un ensemble de boutons permettant l'accès à des opérations génériques de navigation telles que l'arrêt, le démarrage, l'avance rapide et le retour arrière du document en cours de présentation.
  6. Une zone de messages utilisée par Madeus pour fournir des indications à l'utilisateur (compte-rendu d'opérations).
L'utilisateur peut agir directement sur la zone principale (4) tant pour effectuer des opérations d'édition que pour des actions de présentation. Par exemple, il peut sélectionner des éléments pour les composer spatialement, temporellement ou les détruire. Lors de l'exécution, l'utilisateur perçoit à travers cette zone l'évolution de la présentation et peut interagir directement au moyen de la souris. Cette interaction permet l'activation d'éléments comme les boutons, les références ou tout élément multimédia susceptible de réagir à ce type de manipulation (en particulier les programmes applets).

Les documents édités au travers de cette interface de manipulation sont stockés dans un format textuel appelé « format pivot » (cf. Fig 1 ) que l'utilisateur peut visualiser en ouvrant la fenêtre « source ». C'est le format d'échange des documents Madeus dont la syntaxe est décrite dans la section suivante.

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3 Représentation des documents dans Madeus

Le système Madeus manipule des documents décrits selon un format déclaratif sous forme d'un marquage descriptif. Cette description couvre l'organisation logique, temporelle, spatiale et hypermédia des documents.

Afin de faciliter la compréhension du format utilisé, nous allons d'abord donner un exemple d'un document multimédia. Cet exemple met en valeur les possibilités principales du système Madeus. Puis, nous décrivons le format pivot de Madeus, principalement à travers cet exemple.

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3.1 Exemple de présentation multimédia

Supposons que l'on souhaite construire un document multimédia Inria-Opéra qui présente les activités de recherche du projet Opéra (Fig 3 ). Le document comporte un élément texte Titre de la présentation, une Musique de fond, et deux sous-scènes Intro-Inria et Activité-Opéra. Intro-Inria contient un reportage composé d'une vidéo (Vidéo1) qui présente le projet au sein de l'unité de recherche Inria Rhône-Alpes. Un bande audio (Audio1) commente ce reportage et un bouton (Bouton2) permet d'interrompre la sous-scène Intro-Inria. Activité-Opéra est une sous-scène composée de parties : Protos-de-Recherche formée de trois textes (Thot, Alliance et Madeus) et Présentation-Opéra qui contient une audio (Audio2) et une vidéo (Vidéo2). Les trois textes (Thot, Alliance et Madeus) contiennent des liens externes vers d'autres documents. Deux boutons Bouton1 et Bouton3 permettent de naviguer dans le document Inria-Opéra : Bouton1 permet de revenir au début du document et Bouton3 permet d'accéder directement à la partie Présentation-Opéra.
Image inria_opera_exemple.gif
Fig 3. Structure logique du document multimédia Inria-Opéra

Le scénario temporel qu'on veut construire (cf. Fig 4 ) consiste à présenter le Titre en même temps que la Musique. Entre 5 et 7 secondes après le début de la Musique, l'élément Intro-Inria est démarré. Intro-Inria consiste à présenter en même temps la vidéo Vidéo1 et l'audio Audio1 et toute la sous-scène peut être interrompue à tout moment par le bouton Bouton2. La terminaison de Intro-Inria a aussi pour effet de rendre ce bouton inactif. Après la terminaison de Intro-Inria (de façon naturelle ou par l'action du Bouton2), la partie Activité-Opéra est lancée. Dans cette sous-scène, les trois textes Thot, Alliance et Madeus de Protos-de-Recherche sont présentés progressivement avec un délai de 2 secondes entre deux textes successifs. Présentation-Opéra démarre 6 secondes après la fin de Protos-de-Recherche. Pendant toute la présentation du document Inria-Opéra les deux boutons Bouton1 et Bouton3 sont activables.

Image inria_opera_timeline.gif
Fig 4. Scénario temporel du document Inria-Opéra

La disposition graphique du document Inria-Opéra est présentée dans la Fig 5 . La configuration de l'écran sur la Fig 5 correspond à l'instant t (Fig 4 ) de la présentation. Les éléments Vidéo1, Thot, Alliance, Madeus sont encore présents à l'écran, mais ils sont figés dans l'état qu'ils avaient à la fin de leur exécution. On entend l'élément Audio2 et la Musique.

Image inria_opera_dump.gif
Fig 5. Présentation graphique du document Inria-Opéra à l'instant t

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3.2 Langage de marquage

Le marquage descriptif des éléments est le principe de base du format pivot de Madeus. Des marques (ou balises) sont associées à chacun des éléments. Les marques sont utilisées pour typer, délimiter et identifier les éléments d'un document et pour leur associer des attributs. Le marquage est une technique bien connue dans le domaine des documents et a été normalisé dans SGML [GOL 90].

Dans SGML, la structure logique générique est décrite dans une DTD (Document Type Definition) qui spécifie la grammaire d'une classe de documents (HTML en est un exemple) sous la forme d'un ensemble de types d'éléments et d'attributs, et des règles qui permettent de les assembler.

La notion de constructeurs (connecteurs et indicateurs d'occurrences dans SGML) exprime le mode d'assemblage des éléments de la structure. Par exemple, le constructeur « liste » qui permet d'exprimer le fait qu'un élément est composé d'une suite d'éléments de même type, est représenté en SGML par l'indicateur d'occurrence « + » qui indique qu'un type est obligatoire et répétable. Ainsi, le Corps d'une

Présentation peut être décrit comme une liste de Scènes (Fig 6 ).

<!ELEMENT Présentation (Titre, Corps) >
<!ELEMENT Titre (#PCDATA)             >
<!ELEMENT Corps (Scène+)              >
Fig 6. La DTD d'une présentation

Un attribut est une information attachée à un type pour en préciser la fonction dans le document. Il ajoute une information d'ordre sémantique et peut être utilisé par diverses applications (par exemple l'attribut langue est utilisé par un correcteur orthographique dans Thot [QUI 86]). Il existe plusieurs types d'attributs : énuméré, entier, texte et référence, etc.

Dans la figure Fig 7 nous présentons une instance de document selon le format SGML et respectant la DTD décrite en Fig 6 . Les marques <Scène> et </Scène> sont les balises qui délimitent le début et la fin respectivement du contenu des différentes scènes d'une présentation.

<Présentation>
<Titre> Opéra </Titre>
<Corps>
<Scène>
... Cette scène traite des problèmes ...
</Scène>
<Scène>
...  ...
</Scène>
</Corps>
</Présentation>
Fig 7. Un document Présentation en SGML

Il est à noter que dans Madeus, la généricité n'est pas prise en compte, contrairement à des systèmes d'édition comme Thot [QUI 86]. Le marquage s'appuie sur une DTD dont la spécificité est de prendre en compte les aspects relatifs au temps : nouveaux éléments de base, durées, relations temporelles et effets dynamiques sur le style.

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3.3 Structure d'un document Madeus

On a vu dans le chapitre 2 qu'un document multimédia pouvait être considéré selon les quatre dimensions logique, spatiale, temporelle et hypermédia. Le modèle de documents que nous avons défini dans Madeus, dont la DTD simplifiée est donnée dans Fig 8 , permet de décrire ces quatre dimensions :
<!ELEMENT Doc - - (Princ, (Assoc)*)          >
<!ELEMENT (Princ | Assoc) - - (%Base | Comp) >
<!ELEMENT Comp - - (%Base | Comp)+           >
<!ENTITY  % Base "Texte | Image | Audio | Vidéo | Objet" >
<!ENTITY  % AttCommuns 
          "Nom       NAME  #IMPLIED
           Durée     CDATA #IMPLIED"         >
<!ATTLIST Comp 
          %AttCommuns; 
          RelSpat    CDATA #IMPLIED
          RelTemp    CDATA #IMPLIED          >
<!ATTLIST %Base; 
          Contenu    CDATA #IMPLIED
          %AttCommuns;
          Référence  CDATA #IMPLIED
          Inclusion  CDATA #IMPLIED          >
Fig 8. DTD du modèle de documents de Madeus

Les arbres associés sont des éléments flottants : ils n'ont pas de place fixe dans le document. Les éléments associés appartiennent à des structures secondaires car il peuvent ne pas apparaître pendant la présentation.

Dans les sections suivantes, nous détaillons les composants principaux de cette syntaxe en les illustrant avec des parties de l'exemple Inria-Opéra dont la structure générale est donnée en Fig 9 :

<Doc Nom=Inria-Opéra> 
  <Princ> 
    <Texte Nom=Titre
           Contenu="Opéra" 
           Durée="..."> 
    <Comp Nom=Intro-Inria
          Rel-Temp="..."
          Rel-Spat="...">
          <Vidéo Nom=Vidéo1 
                 Durée="...">
          <Audio Nom=Audio1 
                 Durée="...">
          ...
    </Comp>
    ...
  </Princ>
  <Assoc>
     ...
  </Assoc>
</Doc>
Fig 9. Extrait du format pivot du document Inria-Opéra

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3.4 Les éléments de base

Un élément de base est atomique. Il correspond au vocabulaire terminal de la grammaire. Il existe cinq types de base actuellement supportés dans l'application Madeus : Mis à part le type texte qui peut être directement représenté dans le document, le contenu des autres types d'éléments multimédia est stocké dans des fichiers externes (cf. l'attribut Contenu décrit ci-dessous).

[Table des matières]

3.5 Les attributs

L'utilisation des attributs permet dans Madeus non seulement de compléter la description logique des documents, mais aussi de définir leur organisation spatiale, temporelle et hypermédia. Avant de décrire ces différentes catégories d'attributs, nous en identifions les caractéristiques.

[Table des matières]

3.5.1 Caractéristiques des attributs

Trois caractéristiques peuvent être identifiées pour les attributs définis dans Madeus. Le caractère facultatif ou obligatoire ainsi que la portée des attributs sont des notions bien connues dans les modèles de documents. Ce qui l'est moins, c'est la caractéristique temporelle que nous avons introduite sur les valeurs d'attributs. Pour résumer, un attribut peut être : [Table des matières]

3.5.2 Les attributs de structuration

Chaque élément de base ou construit possède les attributs suivants : En outre, les éléments de base portent les attributs obligatoires suivants : [Table des matières]

3.5.3 Les attributs de présentation

Certains attributs de présentation peuvent être portés par les éléments composés pour permettre des mécanismes de propagation par héritage (héritage de la fonte par exemple). La portée de ces attributs dans le document dépend non seulement de son organisation logique, mais aussi de son scénario temporel. Par exemple, si on applique un attribut de changement de volume sur les 3 dernières secondes à un élément composé, les effets dynamiques de cet attribut porteront sur les éléments audio qui seront en cours de présentation sur cette période de temps.

Les éléments de base ne peuvent porter que les attributs servant à la présentation de leur média ; par exemple, la fonte pour les éléments textuels ou le volume sonore pour les éléments audio.

Les attributs de présentation peuvent être statiques ou dynamiques. Les attributs dynamiques permettent de décrire des effets de style, par exemple le déplacement d'un texte à l'écran ou l'apparition progressive à l'écran d'une image. L'idée de base consiste à définir, à partir de la durée totale d'un élément, des tranches de temps (ou projections) pendant lesquelles la valeur de l'attribut varie de façon linéaire, discrète ou continue. Afin de faciliter la modification du scénario, la position de ces tranches est définie par rapport à l'instant de Début ou de Fin de l'élément.

Dans l'exemple de la Fig 10 , nous présentons une application de ce principe à deux éléments dynamiques du document Inria-Opéra, le premier est l'élément textuel Thot et le deuxième, l'élément audio Musique. Pendant les deux premières secondes de sa présentation, l'élément Thot se déplace à l'écran de la gauche vers la droite jusqu'à sa position finale. Pour la séquence audio, le volume de départ augmente progressivement entre le début et 60 secondes de 0 à 50 unités, puis garde une valeur constante pendant 75 secondes avant de diminuer progressivement jusqu'à la fin.

<Texte NOM=Thot 
     Durée="[0, -, 30]s" 
     Fonte=Times 
     Xpos="[0, 200]pts, [Début, 2]s"
     Contenu="Thot : Éditeur de documents ..." >
<Audio NOM=Musique
     MimeType="audio/au"
     Durée="[180, -, -]s"
     Volume="[0, 50]unités, [Début, 60]s;
             50 unités, [60, 135]s;
             [50, 0]unités, [135, Fin]s"
     Contenu="http://opera.inrialpes.fr/Bach.au">
Fig 10. Exemple d'attributs dynamiques dans Madeus

Le placement spatial des éléments fils d'un élément composé peut être spécifié par des relations spatiales définies avec l'attribut RelSpat. L'idée est de permettre à l'auteur de composer son document de la même façon, que ce soit dans la dimension spatiale ou dans la dimension temporelle, par des relations :à gauche de/ avant, à droite de/ après, etc. La définition des relations spatiales ainsi que leur gestion dans le système Madeus fait l'objet d'un travail réalisé en dehors du cadre de cette thèse [CAR 97].

[Table des matières]

3.5.4 Les attributs temporels

Pour chaque élément de base ou composé, il existe trois attributs à partir desquels le scénario temporel est construit :
<Image NOM=Bouton2
     Activable=Oui
     Contrôlable=Non
     Durée="[0, -, 60]s"
     Contenu="http://opera.inrialpes.fr/im.gif">
Fig 11. Exemple d'élément non contrôlable

Dans le format de Madeus, les relations temporelles sont des relations d'intervalles. Elles sont décrites au niveau de chaque élément composé par l'attribut RelTemp. Il existe deux façons de spécifier ces relations :

<Doc NOM=Inria-Opéra 
     ...
     RelTemp= 
      "Titre Equals Musique;
      Intro-Inria During [5, -, 7]s Titre;
      Intro-Inria Before [4, -, 6]s Activité-Opéra;
      ...">
<Comp NOM=Protos-de-Recherche
      ...
      RelTemp="List_Before [2, -, 2]s" >
Fig 12. Les relations temporelles

La durée d'un élément composé est donc fonction non seulement de son attribut Durée et de sa composition temporelle avec ses frères, mais aussi de la durée résultat de la composition temporelle de ses descendants.

Il est important de noter que la structure logique (arborescente) des documents n'est pas le résultat de la composition temporelle entre les éléments contrairement à OCPN [LIT 93] ou Video Algebra [WEI 95a]. Le langage offre cependant un moyen simple de spécifier au niveau d'un élément composé la composition temporelle entre des fils lorsque les deux dimensions coïncident (par des relations List-Before ou List-Finishes).

Afin de faciliter la mise à jour et la réutilisation de parties de document dans Madeus, des éléments ne peuvent être liés par une relation temporelle que s'ils sont frères selon la structure logique. Ce choix qui semble à première vue quelque peu restrictif est en réalité utile pour les opérations d'édition. En particulier, il permet d'isoler des portions de document que l'auteur peut couper, coller ou modifier indépendamment des autres éléments du document. Cette manière de disposer les relations permet de définir de façon précise, pour chaque élément composé de la structure logique, un instant de début, un instant de fin et une durée au même titre que pour les éléments de base du document. Ainsi, les éléments composés peuvent être manipulés au sein de l'éditeur de la même façon que les éléments de base du document.

[Table des matières]

3.5.5 Les liens hypermédia

Les attributs Référence et Inclusion définissent des liens de navigation et des liens d'inclusion entre un élément de base et un autre élément (de base ou composé) du même document ou d'un document externe.

Les références constituent le principal support de la navigation intra et inter-documents. Dans le déroulement d'un scénario temporel, leur activation permet d'effectuer de véritables "sauts temporels" vers les instants de début ou de fin d'un élément ou d'un document. Par exemple Fig 13 , le Bouton3 permet de sauter au début de la présentation de l'élément Présentation-Opéra et l'élément Thot permet d'accéder à un autre document.

<Image NOM=Bouton3
       Référence="Présentation-Opéra" 
       Durée="[0, -, 75]s"
       Activable=Oui
       Contenu="http://opera.inrialpes.fr/Im3.gif">
    
<Texte NOM=Thot
       Référence="http://opera.inrialpes.fr/thot.tp"
       Durée="[0, -, 30]s"
       Activable=Oui
       Contenu="Thot : Éditeur de document ...">
Fig 13. Références internes et externes

Les inclusions sont des liens qui permettent d'ajouter, pendant la présentation d'un scénario, une portion de document définie dans un arbre associé (3.3). Les inclusions peuvent avoir plusieurs utilisations : elles permettent à l'utilisateur d'insérer des annotations dans le document, comme l'élément Message associé à Vidéo2 (Fig 14 ) ; c'est aussi un moyen de définir un scénario avec des choix multiples, par exemple, un choix de titres de films qui incluront les séquences du film sélectionné par l'utilisateur.

Lors de l'activation d'un lien d'inclusion, deux modes de présentation sont possibles en fonction de la valeur donnée à l'attribut Arrêt (cf. Fig 14 ): soit le scénario de l'inclusion est exécuté en parallèle avec scénario courant (comme dans notre exemple), soit le scénario courant est arrêté, l'inclusion est jouée, puis le scénario initial reprend depuis son point d'interruption.

<Vidéo NOM=Vidéo2
     MimeType="video/mpeg"
     Durée="[56, -, -]s"
     Activable=Oui
     Arrêt=Non
     Inclusion="Message"
     Contenu="http://opera.inrialpes.fr/opera.mpg">

<Assoc> 
<Texte Nom=Message
       Contenu="Bienvenue ... "> 
</Assoc>
Fig 14. Élément associé Message et son inclusion

Contrairement aux autres éléments du document, les références et les inclusions introduisent un aspect imprédictible dans le déroulement du scénario (asynchronisme temporel). En effet, leur activation dépend uniquement du comportement du lecteur du document au moment de la présentation.

[Table des matières]

4 Conclusion

Dans ce chapitre, nous avons présenté le système d'édition et de présentation de documents multimédia Madeus. En particulier, nous avons présenté le format de document permettant l'expression des dimensions logique, spatiale, temporelle et hypermédia. Le mode d'expression des scénarios permet de définir de façon souple la dimension temporelle des documents multimédia, sans contraindre leur structure logique.

L'originalité principale de ce format de document réside dans le mode de définition déclaratif de la dimension temporelle (attributs de présentation avec effet de style, attribut d'activation, de répétition et de relations temporelles) qui supprime tout recours à la programmation.

Deux propriétés temporelles sont définies pour identifier les éléments indéterministes indispensables dans la construction d'un scénario hypermédia :

C'est à partir de ce format (et de sa forme internalisée dans l'éditeur) que toutes les fonctions d'édition et de présentation liées au temps sont mises en oeuvre au sein du gestionnaire temporel qui fait l'objet du chapitre suivant.

Notes :

(1)

Dans les systèmes de documents multimédia l'opértion de recherche de solution est aussi appellé formatage.
(2)

Nous utiliserons dans la suite les termes graphes ou hypergraphe pour désigner la structure du problème de synchronisation temporelle.